PETITES PENSÉES
EN VOYAGE
La rose n’est
jamais sans épine
Proverbe Kurde
Florissante serait
l’adjectif le plus adapté pour cette activité agricole. Aux
alentours de Quito la culture de roses a pris le pas sur les autres
productions. Les serres occupent désormais une large partie du
paysage.
En 2015 étaient
répertoriées environ 600 fermes floricoles s’étirant sur 4 000
hectares. Elles employaient près de 100 000 personnes, soit 85 %
de la population locale.
La quasi totalité
de la production, soit largement plus d’une centaine de milliers de
tonnes, est destinée à l’export. Les chiffres diffèrent selon
les sources. Cependant, la production de roses s’élève à plus de
711 millions d’euros. Représentant en valeur 10 % des exports
non pétroliers, la rose arrive au troisième rang après la banane
(7,5 millions de tonnes) et la crevette (39 mille tonnes). Mais avant
le café (3,9 mille tonnes) et le cacao (240 mille tonnes) alors que
le pays est un des plus gros producteurs mondiaux.
Marthita est
ingénieure agronome et travaille à Latacunga pour l’exploitation
floricole de Floranation. Elle et son mari Miguel nous y ont invités
pour une visite.
Dans la Sierra, les
exploitations agricoles bovines sont souvent et malheureusement
envahies de déchets. Ici, nous sommes agréablement surpris par les
abords accueillants et entretenus.
La production est
dictée par les grandes dates. Ainsi, en prévision de la Saint
Valentin, la culture est massivement orientée vers les roses rouges.
Notre visite est rythmée par la description de la production. Tout
est réfléchi : l’eau pompée dans la rivière en respectant
son niveau, l’atmosphère des serres, la gestion des produits
phytosanitaires par informatique, le traitement des déchets verts,….
Cette maîtrise
technique est cohérente avec la réussite économique de la
production.
Les employés sont
majoritairement des femmes, plus minutieuses. Miguel insiste sur la
qualité des conditions de travail : respect des heures, suivi
médical, repas à la cantine de l’exploitation,… Je n’ai pas
le détail mais dans les fermes floricoles les salaires peuvent
atteindre le double du salaire minimum. Les employés restent ici des
années tandis qu’ailleurs ils ne font souvent qu’une saison. Et
en cas de démission d’un salarié, sa famille se presse de
présenter un nouveau candidat.
Miguel précise que
les conditions de travail sont loin d’être aussi bonnes ailleurs.
Les conditions
peuvent être, effectivement, très difficiles. C’est un travail
manuel, avec des périodes intenses, dans l’ambiance des serres
pour un salaire pas toujours en adéquation. Et il n’y a pas
forcément d’alternative d'emploi puisque la floriculture est ici l’activité
principale.
Dans cette
production, les inégalités sociales existent aussi. Un proverbe
français dit « Le chemin de la fortune est parsemé de fleurs
et d’épines ». Le partage n’est cependant pas équilibré.
La plus sournoise
des épines est forcément cachée. L’utilisation de grandes
quantités de produits phytosanitaires, l’atmosphère confinée des
serres et l’absence de protection individuelle seraient à
l’origine de nombreux maux. Cancers, affections congénitales,
troubles neurologiques,… Les employés n’ont pas toujours
conscience de ce danger invisible et le lien de cause à effet est
difficile à démontrer. Mais les médecins s’insurgent et la
population prend conscience.
Alors que faire ?
Les syndicats ont ici un rôle majeur pour la protection des
employés. A l’autre bout de la chaîne, les consommateurs ont une
responsabilité. Il existe ainsi différents labels : Max
Havelaar/Fairtrade, Flower label program, Florecuador,… qui peuvent
orienter les achats. Reste à vérifier la source de ces labels, leur
cahier des charges, si les exploitations les respectent, quels
organismes réalisent les vérifications,…
Cependant, je doute
que l’amoureux transi ait cette prise de conscience lorsqu’il
achète un bouquet de roses pour l’objet de son cœur.
Floranation a les
labels suivants Carbonocero, CYD & Smart Planet, Rainforest
Alliance, Business Alliance for Secure Commerce. Il est également
possible de lire dans les locaux de l’exploitation des affichettes
pour la protection sociale.
Gardons espoir.
Les fleurs inondent
donc le marché mondial. Des millions de tonnes. Ces fleurs peuvent
abriter des insectes. Qui eux même peuvent être vecteurs de
maladies.
Parmi les maladies
émergentes observées dans le monde, citons deux exemples en France.
La Fièvre Catarrhale Ovine (FCO) est arrivé en 2006 depuis les
Pays-Bas. Le virus de Schmallenberg (SBV) qui touche les ruminants, a été découvert en 2011
dans cette ville. Ces virus sont portés par des insectes, des
culicoides. Ni la répartition de la FCO, ni la biologie de
culicoides et l’absence de cas pourtant très caractéristiques de
forme congénitale de SBV ne pouvaient laisser craindre l’apparition
de ces épidémies depuis le nord de l’Europe.
En particulier
depuis la région de Maastricht. Cette ville est la plaque tournante
du commerce international de fleurs. L’introduction de ces maladies
virales par le commerce de fleurs porteuses d’insectes vecteurs est
une hypothèse sérieusement soutenue par les épidémiologistes.
Bienvenue dans le
village mondial.
Dr Kuntz en action!
RépondreSupprimer